Etre une mère, concrètement

Dernier volet de la trilogie des "Devenir mère"

Publié il y a 4 ans

Troisième et dernier volet de ma première trilogie (oui j’en ai d’autres en préparation 😉) qui traite du fait de devenir mère.

Le premier (cf. Devenir mère) portait sur le sentiment de devenir mère, sur cette chose intangible qui nous fait passer d’un seul coup au statut de maman aux yeux de tous, mais plus difficilement au siens.

Le deuxième (cf. Ce qui a changé en devenant mère) traitait de tout ce qui avait changé pour moi avec cette naissance : une vision du monde modifiée et une révélation d’un nouveau moi.

Celui-ci va parler de l’aspect pratico-pratique, de ce que ça implique concrètement et physiquement au quotidien d’être maman ; tout ce à quoi il faut penser qu’on n’avait pas anticipé, des détails qui peuvent vite nous envahir, et des interrogations permanentes très pragmatiques qui nous font douter d’à peu près tout 😉.

Dans cet article c’est donc de cela qu’il va être question, mais aussi de ce qui a changé physiquement depuis que je suis mère ; comment j’ai vécu ces premiers mois de post-partum.

 

 

Durant ma grossesse déjà je m’étais un peu préparée à « l’après ». Même si on n’est jamais vraiment prête à ce qui nous attend réellement, je savais que le post-partum pouvait être une étape plus ou moins difficile. Mon parcours de vie m’a fait côtoyer la dépression de très très près, je savais donc que le terreau était fertile chez moi dans ce domaine, il fallait que je sois très vigilante aux moindres signes annonciateurs d’un possible baby-blues ou plus encore.

Je m’étais aussi préparée à ne pas retrouver mon corps d’avant, pas dans l’immédiat, mais peut-être jamais tout simplement et je pensais avoir accepté cette idée. Pareil, au vu de mon rapport tumultueux avec mon corps j’appréhendais un peu cette étape. Ayant pour habitude de me déprécier, je me demandais comment j’allais gérer cette nouvelle image ; comment j’allais vivre avec ce nouveau corps.

Et puis une dernière chose à laquelle je m’étais plus ou moins préparée, la fatigue. Je savais qu’un bébé ça n’a pas de rythme circadien, les nuits sont hachées et les journées intenses pour apprendre à répondre à tous ses besoins. Malheureusement à part le savoir il n’y a pas grand chose à faire pour s’y préparer, puisque le sommeil ne peut pas se stocker. Quel dommage, si seulement on pouvait faire des réserves ! Pourquoi lors de notre création personne n’a pensé à installer la fonction stockage de sommeil ? par contre la fonction stockage de graisse ça elle existe bien, pas de soucis elle est bien là, on ne peut pas la louper, surtout quand elle se met en mode bouée autour de notre taille !

 

Mais c’était à peu près tout ce sur quoi j’avais un peu anticipé ou du moins réfléchi.

 

Dans les faits j’ai mis peu de temps à réaliser ce qui m’arrivait. Le tourbillon de la matrescence m’a vite embarquée, mais je ne pouvais pas vraiment perdre pied puisque j’avais une bataille à mener, celle de mon allaitement. Pour cela je vous renvoie à un prochain article sur le sujet qui sera assez développé, tellement que ce sera ma prochaine trilogie 🤫.

 

Commençons par le commencement, déjà devenir mère concrètement ça fait mal et le corps en prend un coup.

Si ce n’est pas pendant l’accouchement, les douleurs arrivent de toute façon très vite, elles sont inévitables et elles ont une raison d’être. Il ne faut donc pas hésiter à en parler au personnel soignant à la maternité.

Et en effet j’ai beau ne pas avoir eu de péridurale ni d’épisio, j’ai eu une déchirure qui a nécessité des points, et lors de l’accouchement j’étais dans une très mauvaise position qui m’a laissé des douleurs au coccyx durant de longues semaines.

Les premiers jours j’avais donc du mal à me mouvoir (alors que je ne voulais pas de péridurale aussi pour pouvoir être de suite sur mes 2 pieds) et mes points m’angoissaient beaucoup. ATTENTION, instant pas glamour du tout mais bien réel et qu’on vit toutes : la première fois qu’on doit retourner aux toilettes. J’appréhendais beaucoup cette étape, surtout pour les premières selles, mais je n’ai pas hésité à en parler aux sages-femmes et auxiliaires qui m’ont vraiment écoutée, rassurée et donné ce qu’il fallait pour rendre ce moment indolore dirons nous. Bien sûr elles m’ont aidée à me lever et se sont occupées des changes de mon bébé le premier jour. Elles étaient là pour chaque mise au sein, même si à chaque roulement de service j’avais une autre version des bons gestes à prodiguer pour un allaitement optimal.

 

Autant je pensais que j’aurais mal pendant l’accouchement (ce qui n’a pas été le cas) autant je ne savais pas qu’il y aurait des douleurs une fois le bébé sorti.

J’avais entendu parlé des tranchés, mais toutes les femmes ne les ressentant pas, j’espérais passer au travers. Bon pas de bol ce ne fut pas mon cas. Je les ai bien senti durant 2 jours mais c’était totalement supportable (cf. Article Nuit de la java…wtf !). Elles ne se manifestaient que lors des tétées, et sachant que c’est signe d’une bonne prise du sein, j’étais plutôt soulagée de les ressentir 😌. Dans mon cas je rapprocherai ça du spasme, un peu aigu quand même, une douleur qui lance et qui part assez vite, pour revenir une minute plus tard. Un genre de contraction en version soft, puisque c’est l’utérus qui se contracte pour reprendre sa position et sa taille originelle. Disons que le sentir c’est visualiser très précisément ce qui se passe dans son corps. À chaque fois je voyais mentalement mon utérus se contracter et se replacer, vraiment. Et mon corps a très bien fait son taf puisque le 3e jour, jour de notre sortie de la maternité, tout avait retrouvé sa position initiale.

 

La douleur c’est une chose, mais l’aspect de ton nouveau corps c’est aussi très perturbant. Ce vide qui fait place à tant de vie et de rondeur. 

J’étais encore en salle d’accouchement lorsque j’ai réalisé que mon ventre était vide maintenant. Son papa était en train de l’habiller, je ne l’avais plus dans les bras et il n’y avait plus rien dans mon ventre. Je me souviens avoir regardé mon ventre et avoir pensé que ça y est, j’avais retrouvé un ventre plat. Euh…non, pas du tout, pour ça j’attends encore 😂, mais c’est vrai que ce vide intérieur, physique et non psychique, faisait vraiment bizarre, et en même temps c’était une bonne chose. Je craignais de mal vivre cette étape, vu comme j’avais aimé être enceinte, mais pas du tout, j’étais contente que mon bébé soit sorti et que mon ventre reprenne petit à petit son aspect d’origine (plus ou moins 😉). Mes seins eux étaient au top de leur forme ! Ils étaient énormes, plein de lait, au taquet, prêt à se rendre utile et à remplir leur fonction première, à savoir nourrir (et non attiser la convoitise sexuelle des mâles, on est bien d’accord !). On peut parler de violence du choc, tant la naissance est un moment intense, puissant et les émotions engendrées sont parfois violentes tant elles nous suffoquent et nous submergent.

 

Les douleurs fatiguent comme je le disais, mais aussi et surtout, le manque de sommeil.

Dès le 2e jour notre fils ne voulait déjà plus dormir, j’ai donc refait une nuit totalement blanche à essayer de le mettre au sein, de soulager ses premiers douleurs intestinales et de faire passer son hoquet ! L’angoisse ces hoquets de bébé ! Ils durent des plombes et de ce fait empêchent bébé de s’endormir. Je n’en pouvais tellement plus qu’au petit matin j’ai appelé le papa pour qu’il rapplique le plus tôt possible histoire de prendre un peu le relais.

Petit aparté, nous avions fait le choix ensemble que je reste seule la nuit à la mater. On voulait qu’au moins un de nous deux soit près reposé et il en profitait pour me rapporter des affaires de dernières minutes (comme mon thermos de tisane galactogène, mes snacks préférés…). Mais à chaque couple de faire son choix, c’est important de se sentir à l’aise et sereine avec cette décision.

 

Les premiers jours à la maternité ont donc été fatigants. J’avais fait passer le message à nos proches qu’on ne voulait qu’un nombre très réduit de visites à la maternité, et ainsi savourer entre nous nos premiers pas de parents. Ma demande a été respectée, malgré tout la fatigue s’est très vite installée puisque je ne suis pas une grosse dormeuse et mon fils non plus. Dès le lendemain de sa naissance le décor était planté, on en prenait pour plusieurs mois, voire années sans sommeil !

 

A tout cela s’ajoutait la découverte de l’allaitement, ses joies et ses douleurs là aussi, qu’elles soient physiques ou psychologiques.

 

Durant ce séjour, très très court à la maternité, nous avons également dû emmagasiner beaucoup d’informations à propos des soins à apporter à notre bébé, sur l’allaitement et sur le rétablissement de mon corps.

Je devais à la fois prendre soin de moi et d’un nouveau né. Je ne devais pas faire tout un tas de chose avant 4 à 6 semaines et réfléchir dès maintenant à ma future contraception. Je venais tout juste de sortir un être humain de mon corps qu’on me parlait déjà de sexualité, de préservatifs, de lubrifiant, etc. Sur le coup je n'ai rien retenu, heureusement qu’ils m’ont donné des feuilles avec toutes les infos notées dessus. Pareil pour mon bébé, on nous a donné des ordonnances, des papiers à signer, des échéances de rendez-vous médicaux, mais je n’ai rien retenu. Mon chéri ayant une excellente mémoire ça compensait la mienne totalement absente.

Finalement en rentrant chez moi, j’ai pu relire au calme toutes ces informations, et je me suis rendue compte que c’était très simple. Je ne sais pas pourquoi, je m’étais faite une montagne de toutes ces recommandations, qu’elles seraient compliquées, que je n’étais pas capable de les comprendre et qu’il me serait difficile de les appliquer au quotidien, que ça serait fastidieux. Mais en fait pas du tout. C’était du bon sens, des choses toutes bêtes comme ne pas porter de charges lourdes ou ne pas prendre de bain le premier mois. Vraiment la fatigue nous met dans des états parfois 🤦‍♀️.

Bon pour mon fils c’était un peu plus important, il fallait faire attention aux différents rendez-vous pour les pesées, et la vitamine K à donner à un mois (valable uniquement pour les bébé allaités). La question du tire-lait à gérer, puisque je louais le mien il me fallait des ordonnances à renouveler au bout de 10 semaines, puis tous les 3 mois. Il me fallait la bonne taille de téterelle, les bons accessoires pour la conservation du lait, bref un peu plus technique.

Sans compter la visite avant notre sortie de la personne chargée des papiers officiels, type sécu, mutuelle, état civil. Je n'avais mais alors pas du tout pensé à ça. Ce jour de sortie est resté dans ma mémoire comme le jour le plus embrouillé et oppressant. Il me fallait d’un seul coup penser à beaucoup trop de choses à la fois, et c’est à ce moment que le terme de charge mentale a pris tout son sens pour moi. Il fallait que je contacte ma mutuelle, la pharmacie, la sage-femme qui allait venir faire le suivi à domicile dans le cadre du Prado (service d’aide au retour à domicile) ; qu’on choisisse sur quelle carte vitale rattacher notre fils et le médecin qui allait le suivre. Bref trop d’infos et de questions ce jour là.

 

 

Avant d’arriver chez nous il y a l’étape du siège auto ! Rien de plus pratique et terre à terre que ça 😁. Comment installer un cosy dans une voiture ?

J’avais expressément demandé à mon chéri de faire le test avant de venir, de s’entrainer pour ne pas avoir à vivre ce moment tant redouté. Eh bien malgré tout on a galéré. Il savait comment installer le cosy, mais il ne savait pas comment désactiver l'airbag passager. Heureusement notre petit plumeau dormait profondément ce jour là, l’une des rares fois de sa vie 😉, il n’a donc pas vu à quel point on était en stress sur le chemin du retour, à quel point son papa roulait lentement et comment j’étais les yeux scotchés sur lui durant ces longues minutes de trajet. Les parents en panique totale 🤣. Aujourd’hui ça me fait sourire, mais sur le coup on serrait les fesses 😅. Eh oui, c’est ça devenir parent concrètement, c’est aussi très beau et très fort.

 

Une fois rentrés, on osait à peine le toucher, on restait émerveillés à le regarder dans son couffin. Il dormait toujours bien, et là la question que tous les nouveaux parents se posent, à laquelle j’avais déjà la réponse, mais qui m’a quand même fait doutée, doit-on le réveiller ?

Cela fait 3 heures qu’il dort, dois-je le réveiller pour lui donner à manger ? La réponse est NON, évidement non, pourtant on a fortement hésité. Bien sûr ceci n’est valable que pour un bébé en bonne santé, qui n’a aucune pathologie. Sans contre indication médicale, laissez votre bébé dormir, et profitez en pour vous reposer aussi 😉. Facile à dire, pas du tout à faire j’en ai conscience, je n’ai moi-même jamais réussi à le faire. Et puis les premières heures passées on se pose 10000 questions : sur la façon de l’habiller, le nombre d’épaisseurs qu’il doit avoir sur lui, le change : avant ou après la tétée ?, les sorties… je n’ai pas voulu sortir avec lui les 4 premières semaines. Il était si petit, si fragile. Et puis les recommandations des sage-femmes et puéricultrices allaient dans ce sens, on évite les magasins le premier mois, et on le couvre bien quand on sort se promener. Du coup on a attendu. J’ai attendu de me sentir prête et on a finalement étrenné sa belle poussette au bout d’un mois. Juste pour aller acheter le pain au bout la rue, mais c’était toute une aventure pour nous et on était trop fier !

 

Durant ce premier mois je n’ai pas le sentiment d’avoir vécu de baby blues. Pas de vague de pleurs, pas de nostalgie de la grossesse ni de peur panique à l’idée de m’occuper de mon bébé. Mais par contre une angoisse grandissante et profonde s’est installée en moi comme je l’ai dis dans le précédent article. J’ai perdu en sérénité et en confiance acquise lors de ma grossesse. Le poids de cette nouvelle responsabilité m’a parfois submergée, mais pas au point de perdre pied. Par contre la chute d’hormone s’est faite sentir à retardement, lors de l’arrêt de mon allaitement surtout. Mais là aussi c’était mêlé à d’autres sentiments, d’autres émotions dont je ferai part dans ces fameux articles sur l’allaitement. 

En revanche j'ai ressenti une grande solitude, un isolement non pas physique mais moral, émotionnel. Personne ne comprenait ce que je vivais (l'allaitement difficile). On minimisait, voire ignorait ma détresse et mes angoisses. Et dans ce genre de moments les proches peuvent en rajouter en te faisant culpabiliser parce que d'autres femmes avant toi ont eu 5 enfants et ont très bien assurées seules, alors de quoi tu te plains, tu n'en as qu'un ? Autrement dit fermes ta bouche et souffres en silence comme on dû le faire. La solitude de l'incompréhension était vraiment pire que tout pour moi, même si j'ai mis du temps à l'identifier.

 

Les retrouvailles avec mon corps ont été compliquées. Non à cause de son aspect, mais plutôt de ses défaillances.

J’ai lutté contre lui durant des semaines pour sauver mon allaitement, du coup je n’ai pas été tendre avec lui. Je me suis mis la pression pour que ça fonctionne, je n’ai pas pris le temps de panser mes blessures. Mettre au monde un bébé c’est très éprouvant physiquement, même quand l’accouchement se passe bien. Et les mères ne savent pas assez qu’après un tel exploit il faut prendre soin de soi, se reposer et valoriser ce corps qui a tant donné, qui a donné la vie. Ce n’est qu’après l’arrêt de l’allaitement que j’ai réellement pris soin de moi, que j’ai repris du temps pour moi et repris possession de ce corps qui ne m’appartenait plus depuis le début de ma grossesse. Et ça m’a aidé au final à apprécier ce qu’il était devenu. Il est loin d’être parfait, pas mal de choses se sont modifiées, ma poitrine surtout, mais j’ai décidé de faire avec et de ne plus me dénigrer physiquement. Mon rapport à mon corps est plus sain maintenant et ça fait un bien fou !

 

Quant à la fatigue bon bah la j’ai lâché l’affaire en fait. En pratique notre fils est un petit dormeur, visiblement c’est un diagnostic officiel, donc pas grand chose à faire.

En définitive ce qui est le plus dur pour moi depuis que je suis maman, c’est de constater que mon temps ne m’appartient plus. Mon quotidien est rythmé par mon fils. Entre les pseudo siestes, les repas, les changes, les phases de jeu et de promenade, je n’ai tout bonnement pas de temps pour moi. Or je suis une solitaire qui a besoin de ces moments seule pour pouvoir se ressourcer. Vous comprenez mon dilemme, entre mon coeur de maman qui veut tout faire au mieux pour son enfant, et mon besoin vital d’être humain/femme de me retrouver seule.

 

Pour résumer : plus de nuits complètes, plus de temps à soi, un corps en vrac, des hormones dans tous les sens, des cheveux et une peau qui n’en font qu’à leur tête et un périnée à rééduquer. Sans parler des émotions à fleur de peau, l'isolement le temps du congé mat, et plus si on garde son enfant. Tout cela dans un flou artistique total quant à la « bonne façon de faire » avec son nouveau né et une avalanche de conseils/recommandations/astuces/injonctions qui ne sont ni souhaités ni souhaitables !

Voilà en pratique ce que c’est que ma vie de maman et les défis que je dois relever au quotidien.